1/ Namiko I
Ou es tu petit humain?
Le corps droit et immobile dans l'obscurité totale, ses yeux nyctalopes scrutent le long tunnel abandonné des égouts. Ses sens aux aguets captent la moindre information comme un trou noir absorbe la lumière. Il ne s'échappera pas parce qu'il a peur et que la peur est le meilleur moyen de faire des erreurs. Il ne s'échappera pas parce qu'elle est un prédateur avec cinq générations d'avance, pur produit de l'ancien savoir humain. La respiration rythmée sur la méditation, l'attente commence.
Plic, ploc..
Vu. Son corps se déplace comme le vent pour se fixer sur le plafond, elle avance et se place au dessus de sa cible. Comme une ombre, ses mouvements se cale sur ceux de sa proie. L'humain a réussi, dans sa fuite, à emporter un fusil. Il avance maladroitement dans l'eau noire, braquant son arme sur la moindre ombre et respirant fort comme un animal. Prenant son temps pour l'observer, elle se contente de le suivre. Elle aime se mettre en difficulté, s'inventer des défis. Pas cap de le désarmer sans le toucher avant de le tuer. Mais la faim reprend le dessus. Il serait pourtant aisé de se laisser tomber derrière lui, de dire "Bouh!" et de le tuer au corps à corps. Non, quand on chasse, on chasse correctement. La perfection ne s'obtiens que par la répétition.
Ses mains glissent sur ses wakizashis pour en saisir les poignets. Son esprit se concentre sur les mouvement de sa proie. Attendre l'instant. Entre deux pas. Ici.
Le sang gicle de son cou décapité au rythme des derniers battements de son cœur. Namiko saute à coté du corps pour le rattraper, elle découvre le bras et plante ses crocs dans le poignet. Le sang chaud coule dans sa gorge. Doux instant de réconfort. La chaleur envahit et ragaillardit son corps et son esprit. Rassasié, elle se retire enfin de la plaie ouverte pour laisser le corps tomber dans l'eau sale et écarlate. Dans un réflexe elle ressaute au plafond. Toujours se déplacer par rapport au bruit. Un petit rot s'échappe alors de sa bouche, elle met vite sa main devant pour retenir un fou rire. Décidément l'ivresse du sang lui monte à la tête. Il est tant de remonter à la surface. Elle se prépare à partir quand elle s'aperçoit qu'un son étouffé lui arrive aux oreilles plein Est. Qu'es que ca peut bien être? Ces couloirs sont sensés n'abriter que quelques mutants, hors elle ne reconnait pas ce son. Il est toujours bon de savoir avec quoi on vit. Elle décide de se laisser guider vers sa source.
Après une petite marche à travers les ancien couloirs, le son semble finalement provenir d'un puits. Plus elle s'en approche, plus elle pense reconnaitre comme un chant humain monocorde et monotone. Elle penche sa petite tête au dessus du puits. C'est le noir absolu, et même elle ne distingue rien si ce n'est une faible lumière orangée au fond. Elle aime pas trop les trous mais allez, pas cap. C'est pas le moment de faire demi-tour à deux pas de savoir.
Le tunnel étroit et obscure débouche d'un plafond vouté sur une immense pièce en pierre taillée. Au milieu de la pièce, une centaine d'humain disposés en cercle, habillés d'un manteau noir et encapuchonnés, sont debout et parfaitement immobiles. Les mains jointes en prières et la tête baissée, ils chantent ce chant continu et grave qui commence à lui tourner la tête. Elle ne distingue aucun visages sous les capuches, de tel sorte qu'on dirait une armée de stèle noire. Prise par la curiosité, elle se risque doucement sur le plafond pour se rapprocher de la scène. Au milieu du cercle un hideux totem se dresse, fruit bâtard du croisement entre un arbre mort, un épouvantail et une statue païenne. Prudemment, elle arrive petit à petit sur le sol, derrière un des moines. Le chant continu lui occupe de plus en plus l'esprit. Une forte odeur rance et épaisse brouille ses sens. Cachée dans l'ombre elle observe la scène.
C'est pas qu'on s'ennuie mais ca doit bien faire dix minutes qu'ils chantent leur hululement lugubre et répétitif de pantin. Namiko réfléchie à ce qu'elle pourrait faire comme bêtise pour passer le temps. Elle sourit en s'imaginant le scandale si elle se mettait à brailler à tue-tête "Drunken Sailors". Ou pourquoi pas utiliser son arme secrète : se mettre à parler à la cible la plus proche jusqu'à se qu'elle craque. Arme qui a envoyé les plus coriaces dans les jupes de leur mères. Allez, c'est assez pour ce soir, on en verra pas plus. Elle remonte sur son mur et se hisse jusqu'au puits. Un dernier regard se tourne sur l'assemblée. Il n'ont pas l'air bien dangereux, à part pour leur voisin. Elle rentre dans le puits et entame sa route jusqu'à la surface.
Enfin. La lune est ronde et blanche, et la nuit calme. Le vent glacé qui fouette sa peau réveil ses sens. Cette viré souterraine lui a fait oublier la réalité de la surface. Le clan, le devoir, le siège. Son esprit vif retiens la meilleure route à prendre. Sombre et rapide. Ses muscles se détendent, la projetant comme une flèche dans la nuit.
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